Faut-il décorréler le prix de l’électricité du prix du gaz face à la crise énergétique ?

« On ne peut pas continuer à avoir un prix de l'électricité qui soit indexé sur celui du gaz » expliquait Valérie Rabault, vice-présidente de l’Assemblée nationale en novembre 2022. En effet, l’envolée des prix du gaz a fait grimper la facture d’électricité des consommateurs. Dans un contexte de crise de l’énergie, beaucoup envisagent de décorréler le prix de l’électricité du prix du gaz. Comment expliquer cette relation entre les deux énergies ? Comment dissocier le tarif de l’électricité de celui du gaz naturel sur les marchés de gros européens ? Qu’en pensent les Etats-membres de l’Union européenne ? Alpiq fait le point.

Quel lien de corrélation entre le prix de l’électricité et le prix du gaz ?

Avant de comprendre pourquoi les gouvernements souhaitent découpler le prix de l’électricité du prix du gaz, il convient d’appréhender le fonctionnement du marché de gros et la manière dont sont fixés les prix de l’électricité. 

Le gaz naturel, source de production d’électricité  

Tout d’abord, il faut savoir que le gaz naturel peut servir à produire de l’électricité. Utilisé dans les centrales thermiques à flammes, cette énergie constitue 19,7% du mix électrique de l’Union européenne

Comme dans tout type d’industrie, lorsque le coût d’une matière première augmente, elle fait mécaniquement partir à la hausse le prix de la production. Or, le cours du gaz a fortement grimpé depuis 2021 du fait de la reprise économique post-Covid. Cette hausse s’est poursuivie du fait de la guerre en Ukraine. Sur les marchés de gros, le point échange gaz (PEG), le prix du MWh de gaz est passé de 20,493 € en janvier 2021 à 84,408 € en janvier 2022 avant de redescendre à 60,409 € en janvier 2023. Cette volatilité des prix de la molécule s’est traduite par une augmentation du prix de l’électricité

Marché spot et logique de « merit order » 

Sur les marchés spot de l’électricité, le prix de l’énergie évolue toutes les 30 minutes. Ce prix est fixé selon le principe du merit order ou de la préséance économique, en Français. C’est aujourd’hui ce système qui est critiqué lorsque l’on parle de découpler le prix de l’électricité à celui du gaz. 

Le merit order est un mécanisme qui consiste à fixer le prix de l’électricité en appelant les unités de production d'électricité selon un ordre de priorité déterminé par leur coût marginal variable. On appelle en premier les énergies renouvelables, puis le nucléaire puis les énergies fossiles. Le prix du kWh d’électricité sur les marchés de gros en Europe correspond alors prix de la dernière unité appelée.

Lorsque la demande en électricité est faible, le système ne nécessite que des sources d'énergie à faible coût marginal, comme les énergies renouvelables. Le prix de l’électricité diminue. A l’inverse, lors de pointe de consommation, les énergies renouvelables et le parc nucléaire ne sont pas forcément suffisants pour répondre aux besoins des consommateurs. Le système doit faire appel à des sources d'énergie à coût marginal plus élevé, les énergies fossiles (centrales à charbon, gaz, etc.), ce qui fait grimper le prix du kWh. 

En France, les énergies fossiles ne représentent que 7% du mix énergétique de production d’électricité. Le nucléaire et les énergies renouvelables, dont les coûts marginaux sont moins élevés, représentent donc ensemble 93% de notre mix. Décorréler des prix du gaz permettrait donc aux consommateurs de l’Hexagone de profiter d’un prix plus proche des coûts réels de production. Dans ce contexte de crise, ces prix pourraient donc être plus bas.

Décorréler le prix de l’électricité et du gaz : un accord difficile à trouver au niveau européen

Dans le système actuel, difficile de dissocier les prix du gaz de ceux de l’électricité. Si la réforme est plébiscitée par certains pays, comme la France, l’Allemagne ou encore l’Autriche, d’autres Etats semblent plus réticents. 

C’est ce qu’explique Laurence Boone, la secrétaire d’Etat chargée de l’Europe, « Le découplage que nous demandons du prix du gaz et de l’électricité nous bénéficie, mais coûtera cher à d’autres pays. Il faut que l’on arrive à trouver un mécanisme qui fait que l’on peut en bénéficier, mais sans faire porter de coûts financiers à ceux qui produisent beaucoup d’électricité avec du gaz ». C’est par exemple le cas de la Hongrie, pour qui le gaz représente 26% de la production d’électricité ou l’Italie, pour qui le gaz constitue presque 50% du mix électrique.

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Comment dissocier le prix de l’électricité et du gaz ?

Pour dissocier les prix du gaz et de l’électricité, plusieurs pistes sont à l’étude. Voici les propositions de certains acteurs de l’énergie.  

Mettre en place un mécanisme de compensation 

Afin de décorréler les prix du gaz et de l’électricité, Nicolas Goldberg responsable du pôle énergie du think tank Terra Nova propose « d’instaurer entre l’État et les producteurs un prix de l’électricité dans des ‘contrats pour différence’. Avec ce type de contrat, le producteur vend toujours sa production sur le marché de gros au prix de marché. Par contre, si le prix de marché est inférieur au prix convenu avec l’État, ce dernier lui verse la différence. À l’inverse, si les prix de marché sont plus élevés, le producteur reverse la différence à l’État. » 

Cette idée reprend celle du mécanisme de compensation pour la production d’électricité renouvelable. C’est ce qu’a mis en place la France, pour encourager le développement des énergies renouvelables comme l’éolien et l’énergie solaire. Lorsque les prix du marché sont inférieurs à prix cible fixé par lors du développement de l’infrastructure renouvelable, l’Etat octroie un complément de rémunération au producteur afin de lui assurer une rémunération juste. 

Renforcer les PPA 

Autre piste étudiée, celle des PPA énergie (Power Purchase Agreement). Il s’agit de contrats de longs termes signés directement entre un gros consommateur d’énergie (industrie, grand tertiaire, collectivité) et un producteur d’électricité renouvelable. En échappant à l’intermédiaire qu’est le marché, ces contrats sont signés sur 5 à 20 ans et garantissent un prix stable de l’électricité à l’acheteur.

La transition énergétique pour réduire le prix de l’électricité

Enfin, sur le long terme, la transition énergétique apparaît comme une réponse pour dissocier le prix du kWh d’électricité de celui du kWh de gaz. En effet, en engageant une sortie des énergies fossiles, l’Union européenne pourra faire profiter à ses citoyens d’une énergie propre et moins chère. 

En effet, le prix de l’électricité verte décroit d’année en année. Selon le LCOE 2021 (Levelized Cost of Energy ) de la banque Lazard, le prix de production d’un MWh d’électricité photovoltaïque est passé de 359 $ en 2009 à 37 $ en 2020.

Bon à savoir

Pour vous engager dans la transition énergétique, vous pouvez souscrire une offre d’électricité verte. Chez Alpiq, pour vous laisser la main sur votre consommation d’énergie, nous vous proposons de choisir le pourcentage d’électricité renouvelable que vous voulez ajouter dans votre contrat.

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